lundi 21 décembre 2020

RELAXE !

Le Tribunal correctionnel de Perpignan a relaxé Yves MEUNIER, du fauchage de 3 ha de tournesols mutés en août 2016 à Elne.

Quant aux dommages-intérêts, les parties civiles ont été déboutées de leur demande.

Nous attendons avec impatience de recevoir les attendus.

jeudi 19 novembre 2020

Communiqué de la Confédération Paysanne des Pyrénées-Orientales :

Nouveaux OGM : combien de temps un Premier ministre peut-il contrevenir aux injonctions du Conseil d’État ?

Alors qu’une amende de 5 000 euros a été requise par le procureur lors du procès d’un Faucheur volontaire à Perpignan le 15 octobre ; le Premier Ministre Jean Castex, lui, n’applique toujours pas la décision du Conseil d’État de février dernier, lui enjoignant d’interdire les variétés cultivées et commercialisées en France en infraction à la réglementation OGM. Cela concerne notamment toutes les variétés de colza Clearfield de BASF rendues tolérantes aux herbicides.

Le 4 novembre dernier, soit trois jours avant la fin de l’échéance fixée par le CE, l’Union Française des Semenciers (UFS) a « souhaité », par voix de presse, une « adaptation réglementaire » permettant de ne pas appliquer cette injonction. Après avoir refusé de publier avant le 7 août le décret exigé par le CE et destiné à identifier les techniques de mutagenèse pouvant être exemptées de ces obligations, le Premier Ministre n’a pas non plus publié la liste des variétés de colza CL non exemptées. On peut légitimement se demander qui commande à Matignon : la loi votée par le Parlement et confirmée par le CE ou les multinationales semencières ?

L’UFS prétend que la Commission européenne bloquerait l’exécution des décisions du CE. La Commission a effectivement indiqué que, selon elle, ces décisions pourraient poser des problèmes de conformité à la législation européenne. Mais son opposition a pris fin le 9 novembre et elle ne l’a pas renouvelée[1].

L’UFS prétend ensuite que ces décisions mettraient en difficulté toute la chaîne alimentaire au prétexte de l’impossibilité d’identifier les produits issus de ces variétés venant de pays de l’Union européenne décidant de ne pas les appliquer.

À l’heure de la segmentation des marchés, des test génétiques de masse, de la blockchain permettant à tout consommateur achetant des œufs de connaître le lieu et la date de naissance de la poule qui les a pondus, de l’interdiction d’importation de cerises traitées avec des pesticides interdits en France mais encore autorisés dans d’autres pays de l’Union européenne…, une telle affirmation est pour le moins surprenante. Sauf à faire preuve d’une mauvaise volonté délibérée pour ne pas appliquer la loi. Cette affirmation est d’autant plus surprenante que l’arrêt du CE n’est que l’exécution d’un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne qui s’impose à tous les pays de l’Union.

Pendant que le gouvernement et les semenciers jouent la montre, les colzas OGM illégalement cultivés et les herbicides associés à leur culture contaminent de manière irréversible les autres cultures, la biodiversité sauvage, les sols, l’eau et notre alimentation. L’île de Tasmanie vient ainsi d’indiquer que des repousses de colza OGM sont encore présentes sur son sol alors que les quelques expérimentations qui s’y sont déroulées sont stoppées depuis 20 ans !

Le gouvernement, qui va obtenir du Parlement[2] la suppression du Haut conseil des biotechnologies et donc l’affaiblissement de l’expertise et de la participation de la société civile, ne peut continuer ce travail de sape et s’exonérer ainsi de l’application des lois de la République, en pleine crise sanitaire, sécuritaire, économique et sociale qui monopolise l’attention des citoyen.nes.

La Confédération paysanne appelle donc le Premier Ministre à exécuter immédiatement les injonctions du Conseil d’État ».

 

[1] https://ec.europa.eu/growth/tools-databases/tris/fr/index.cfm/search/?trisaction=search.detail&year=2020&num=280&mLang=FR

[2] A l’issue de l’examen de la loi de programmation de la recherche, définitivement adoptée ce mardi par l’Assemblée nationale et ce vendredi par le Sénat.

 

Témoignage de Guy Kastler au procès d’Yves Meunier à Perpignan le 15 octobre 2020


Paysan dans le Minervois héraultais où j’ai cultivé la vigne et élevé des brebis pour produire du vin et des fromages, je suis aujourd’hui retraité. Membre de la Confédération paysanne que je représente au Comité Technique Permanent de la Sélection des plantes et au Comité Économique, Étique et Social (CEES) du Haut Conseil des Biotechnologies (HCB) depuis sa création en 2009, je viens ici expliquer pourquoi mon syndicat soutient Monsieur Yves Meunier et les faucheurs volontaires qui ont agi à Elne en 2016 pour faire respecter la loi et l’intérêt général.

Leur action ne résulte pas d’un coup de tête isolé, mais doit être replacée dans son contexte. Depuis 15 ans, les entreprises semencières développent et diffusent en effet illégalement des OGM tolérant aux herbicides en déclarant qu’il ne s’agit pas d’OGM, mais de variétés traditionnelles qui ne génèrent aucun risque. Leur objectif est de contourner la réglementation européenne qui, depuis 1997, rejette toutes les demandes d’autorisation de culture d’OGM rendus tolérant aux herbicides en raison des dommages qu’elle engendre pour la santé, l’environnement et les autres cultures. Ces dommages sont largement démontrés dans les pays qui ont accepté leur culture et par des centaines de publications scientifiques.

C’est d’abord de la santé des agriculteurs et de leurs salariés dont il est question. Ils sont en effet les premiers en contact avec les herbicides dont la toxicité n’est plus à démontrer. Leur caisse d’assurance, la MSA, reconnaît que nombre d’entre eux souffrent de maladies graves directement liées à l’usage de ces substances toxiques. Mais les agriculteurs ne sont pas les seuls menacés.

Bien qu’ayant toujours travaillé en agriculture biologique, donc sans herbicides, je suis aussi concerné. Comme tous ceux qui l’ont analysé, j’ai en effet dans mes urines un taux de glyphosate supérieur à ce qui est autorisé dans l’eau potable. Un article du Monde du 15 janvier 1997 révélait déjà que l’INRA « a constaté qu’il tombe sur la région (en Bretagne) une pluie chargée de désherbants dont le taux dépasse les normes européenne établies pour la potabilité de l’eau ». L’INRA explique que, lors des épandages, 25 à 75 % des herbicides ratent leur cible et se retrouvent dans l’eau des rivières. Et, lorsqu’il fait soleil, « la plupart des herbicides se fixent sur les molécules d’eau et transitent dans l’atmosphère par simple évaporation »… pour retomber à des dizaines ou centaines de km plus loin avec l’eau de pluie, jusqu’à trois mois après la saison d’épandage. Il n’y a aucune raison que ces phénomènes se produisent uniquement en Bretagne et non autour d’Elne, notamment dans la zone humide protégée proche des champs cultivés par les tournesols de NIDERA, située sous le vent dominant. Mais curieusement, ces évaluations de l’INRA n’ont pas été poursuivies et les herbicides continuent depuis à être épandus sans aucun thermomètre permettant de mesurer leur dispersion.

Je développerai d’abord l’inaction systématique et l’obstruction du gouvernement sur ce sujet. Je reviendrai ensuite sur les glissements sémantiques utilisés par les sociétés NIDERA et BASF pour contourner les lois, avec la complicité des autorités.

Les premières cultures de tournesol Clearfield sont arrivées en France en 2010. Dès 2009, la Confédération Paysanne a interpellé, avec ses partenaires et les faucheurs volontaires, l’institut technique agricole qui avait mis en place des expérimentations dans le Gard, puis le gouvernement. Le Ministère de l’Environnement nous a très rapidement reçu et a déclaré partager nos inquiétudes. Le gouvernement a saisi l’INRA et le CNRS qui ont publié en 2011 les résultats d’une expertise collective confirmant l’augmentation de l’utilisation des herbicides qui accompagne la culture des VrTH et la nécessité de mettre en place une politique de maîtrise des risques qu’elles génèrent pour la santé et l’environnement.

Le HCB a ensuite organisé une journée consacrée aux OGM rendus tolérants aux herbicides. Les échanges ont confirmé ces risques ainsi que l’absence d’évaluation et de politique permettant de les maîtriser, mais ils n’ont fait l’objet d’aucun avis officiel. Le HCB s’est contenté de publier une note sur l’expertise INRA/CNRS concluant que le développement de VrTH déclarées OGM sera rendu impossible du fait du surcoût de la coexistence et de la traçabilité des filières se surajoutant au surcoût des semences et des herbicides.

En décembre 2012, le Ministère de l’agriculture a triomphalement annoncé la signature d’une charte de bonnes pratiques de cultures des VrTH. Mais cette charte n’est qu’un nuage de fumée. Elle engage en effet que les vendeurs de VrTH et d’herbicides et non ceux qui les cultivent et les utilisent. Le Verbatim des auditions de l’ANSES en 2017 nous apprend que l’application de cette charte par BASF a consisté à interroger une année sur deux 78 agriculteurs, par une enquête téléphonique de 18 minutes portant sur leur satisfaction, l’efficacité de ses VrTH, leurs pratiques de maîtrise des adventices et d’utilisation des herbicides. BASF indique n’avoir fait aucun état des résistances des adventices sur les parcelles choisies, alors que l’apparition de ces résistances est le premier indicateur des risques des VrTH, puis rajoute que « la quasi-totalité des agriculteurs connaît au moins une des bonnes pratiques ». Cela est plutôt inquiétant pour les nombreuses autres bonnes pratiques indispensables à la maîtrise des risques des VrTH et il n’est pas étonnant que les Ministère de l’agriculture puisse déclarer que les remontées du suivi des culture de VrTH ne révèle aucun problème.

Le 10 décembre 2014, la Confédération Paysanne et 8 organisations paysannes, environnementales et citoyennes ont saisi le Premier Ministre d’une demande préalable de moratoire sur les cultures de VrTH et de rectification de la législation OGM française pour la rendre conforme à la réglementation européenne et permettre son application aux VrTH obtenues par diverses techniques de mutagenèse rentrant dans son champ d’application.

Le 16 décembre, l’EFSA, le JCR (consortium de laboratoires européens sur les OGM), le HCB et le Ministère de l’Environnement ont organisé à Paris un séminaire sur les VrTH où de nombreux intervenant ont confirmé la nécessité de maîtriser les risques engendrés par leur culture.

En février 2015, le Parlement a débattu d’un projet de loi demandant un moratoire sur les VrTH. Le 4 mars, la Ministre de l’Environnement a suspendu ce débat en annonçant son intention de saisir l’ANSES de cette question.

Le 4 mars, en l’absence de réponse du Premier Ministre, nous avons saisi le Conseil d’État.

Le 22 février 2016, la Ministre de l’environnement a saisi le HCB pour lui demander de proposer un encadrement juridique des OGM obtenus par les nouvelles techniques de mutagenèse autre que celui de la directive européenne 2001/18. Face à l’évidente illégalité d’une telle question, la Confédération Paysanne et 6 autres organisations agricoles et environnementales ont refusé d’être obligées d’y répondre et ont démissionné du Comité Économique, Éthique et Social du HCB.

Le 9 juin 2016, le Conseil d’État a organisé une audience contradictoire suite à notre saisine. À la stupéfaction générale, le Ministère de l’agriculture a indiqué qu’il n’existait pas de surveillance d’éventuelles apparitions d’adventices rendues tolérantes aux herbicides, ni dans les cultures de VrTH ni à proximité de ces cultures, mais uniquement sur les quelques parcelles du réseau national de surveillance biologiques du territoire implantées sans aucun lien avec l’emplacement des cultures de VrTH. Le 3 octobre, le Conseil d’État a saisi le CJUE de 4 questions préalables.

Le 25 juillet 2018, la CJUE a nous a donné raison en confirmant que les plantes obtenues par de nouvelles techniques de mutagenèse sont des OGM réglementés.

Le 17 janvier 2019, le tribunal de Dijon a confirmé la légitimité de nos interrogations en relaxant les faucheurs volontaires qui avaient neutralisé un essai de VrTH de colza Clearfield de BASF car l’instruction n’avait pas établi que ces colzas ne sont pas des OGM réglementés.

Le 26 novembre 2019, l’ANSES a rendu son avis sur les VrTH en formulant des recommandations en matière d’évaluation des risques liés aux VRTH. Mais, contrairement aux promesses ministérielles de 2015, le Parlement n’a pas repris ses débats sur la proposition de loi de moratoire sur la base de cet avis.

Le 7 février 2020, le Conseil d’État nous a donné raison à son tour en précisant que, si les plantes obtenues par des techniques traditionnelles ne sont pas soumises à la réglementation OGM, celles issues de techniques « de mutagenèse dirigée et de mutagenèse aléatoire in vitro soumettant des cellules de plantes à des agents mutagènes chimiques ou physiques » produisent des OGM réglementés. Il a enjoint au Premier Ministre de modifier en conséquence le code de l’environnement et, dans le même délai de 6 mois, « de prendre les mesures nécessaires à la mise en œuvre des recommandations formulées par l’ANSES en matière d’évaluation des risques liés aux VRTH » afin de prescrire des conditions de culture appropriées. Il confirmait ainsi d’une part que les VrTH de colza Clearfied issus de culture in vitro de cellules de pollen sont bien des OGM réglementés commercialisés en toute illégalité malgré les mensonges de BASF affirmant qu’ils sont issus de techniques de sélection traditionnelles et d’autre part que la culture des VrTH de tournesol doit être réglementée.

Pendant toute cette période de 2010 à 2020, nous n’avons jamais cessé d’alerter les pouvoirs publics pour réclamer l’application de la réglementation et les faucheurs volontaires ont multiplié leurs actions de désobéissance civique dans le même but. Les cultures de VrTH de tournesol ont de leur côté continué à progresser jusqu’à atteindre 180 000 ha selon les déclarations de firmes, sans que le gouvernement ne prenne aucune nouvelle mesure ni pour évaluer et maîtriser les risques, ni pour appliquer la réglementation OGM aux variétés concernées.

La raison de notre démission du HCB ayant été supprimée par le Conseil d’État, nous avons repris notre place au sein de son CEES avec 4 autres organisations démissionnaires et avons activement participé en juin 2020 à la rédaction de sa recommandation portant sur le projet de décret soumis par le gouvernement en application des injonctions du Conseil d’État. Mais aujourd’hui, plus de 2 mois après la date limite fixée par le Conseil d’État, le gouvernement n’a exécuté aucune de ses injonctions. Nous l’avons en conséquence saisi à nouveau lundi dernier pour non exécution de ces décisions, au risque de perdre à nouveau de nombreuses années en procédures.

Qu’en est-il des VrTH de tournesol d’Elne ? Elles sont destinées à la production de semences hybrides elles mêmes destinées à être commercialisées. La société NIDERA qui en est propriétaire est un très ancien partenaire de BASF qui commercialise illégalement des colza OGM. BASF commercialise aussi des tournesols Clearfield et Clearfield Plus. Quand on les interroge sur les procédés d’obtention de ces tournesols, NIDERA et BASF évoquent des méthodes traditionnelles et l’apparition « spontanée » d’un mutant « naturel » dans un champ de soja du Kansas. Il ne manque que la musique country pour rendre ce récit publicitaire plus crédible.

Selon l’INRA et le CNRS, ces mutants spontanés sont certes « à l'origine des hybrides de tournesol Clearfield® de BASF (…), mais nécessitent un deuxième gène pour obtenir une tolérance complète aux imidazolinones ». D’où vient ce deuxième gène ? L’Agence canadienne de santé indique qu’il est porté par une lignée obtenue par mutagenèse. Mais elle ne dit pas s’il s’agit d’une technique de mutagenèse traditionnelle ou réglementée OGM. Le rapport de l’ANSES, dans sa version de 2019, dit que « le tournesol Clearfield Plus tolérant à l’imazamox est obtenu également par mutagenèse in vitro ». Curieusement, 2 mois plus tard une nouvelle version du même rapport indique que, selon les données transmises par BASF France division Agro, « le tournesol Clearfield Plus tolérant à l’imazamox est obtenu par mutagenèse in vivo ». Il est vrai que, entre ces deux dates, le Conseil d’État a précisé que les techniques de mutagenèse appliquées sur des cultures de cellules végétales in vitro produisent des OGM réglementées. On peut dès lors se demander si ce sont les déclarations de BASF ou ses procédés d’obtention qui sont à géométrie variable suivant les évolutions réglementaires ?

Le verbatim des déclarations de BASF à l’ANSES précise dans une note bas de page que « le caractère de tolérance herbicide Clearfield Plus tournesol lancé en 2016 est protégé par un brevet ». Cette précision explique la variabilité des déclarations de BASF. En effet, si son tournesol Clearfield Plus est issu d’une technique traditionnelle, il n’est pas brevetable et ses concurrents peuvent librement copier son procédé d’obtention. Mais pour être brevetable, il doit être issu de techniques de génie génétiques donnant des OGM réglementés. Selon le brevet WO2007005581 accordé en 2007 à NIDERA et BASF pour un tournesol résistant aux herbicides, l'invention concerne des plants, des cellules, des polynucléotides (brins d’ADN ou d’ARN) de tournesol de type sauvage, donc non brevetables, mais aussi transgéniques ou non transgéniques. Cette invention porte également sur des cassettes d'expression et des vecteurs de transformation comprenant les polynucléotides de l'invention ainsi que sur des plants et des cellules hôtes transformées par ces polynucléotides, c’est à dire par des techniques de génie génétique transgéniques ou non transgéniques brevetables. Le brevet décrit ensuite de nombreuses méthodes utilisables pour obtenir ces plantes, ces cellules et ces polynucléotides parmi lesquels figurent tout autant des procédés essentiellement biologiques non brevetables donnant des plantes non OGM que des procédés brevetables de mutagenèse appliquée sur des cultures in vitro de cellules végétale produisant des OGM réglementés.

NIDERA, aujourd’hui racheté par SYNGENTA, et BASF peuvent ainsi, selon les besoins, déclarer avoir utilisé l’une ou l’autre de ces techniques : lorsqu’il s’agit d’obtenir leur brevet et de revendiquer des droits de licence, leur tournesol est issu de techniques appliquées sur des cellules cultivées in vitro produisant des OGM réglementés ; mais pour les demandes de mise en marché, il est issu de techniques traditionnelles non OGM et non brevetables. Et comme les autorités qui accordent les autorisations de mise en marché ne cherchent jamais à vérifier leurs déclarations, malgré les brevets et les rapports de l’ANSES à géométrie variable sur ce sujet, NIDERA et BASF poursuivent tranquillement leurs petites manœuvres. Ils ne sont pas seuls. Ce mois-ci, la société CIBUS qui commercialise en Amérique du Nord un soja OGM selon la réglementation européenne a elle aussi modifié ses déclarations et indiqué qu’il avait en fait été obtenu par une technique qu’elle estime non OGM. Sans doute souhaite-t-elle pouvoir exporter en Europe ?

Les tournesols d’Elne sont-ils ou non des OGM non déclarés, donc cultivés illégalement ? La réponse est toujours cachée derrière les déclarations contradictoires de NIDERA et de BASF et la complicité active des pouvoirs publics. Ce sont dans tous les cas des VrTH dont la culture devrait depuis longtemps être réglementée et qui ne l’est toujours pas.

Face à de telles manœuvres et obstructions au service d’intérêts financiers privés, la Confédération Paysanne ne peut que soutenir l’action de désobéissance civile d’Yves Meunier et des faucheurs volontaires au service de l’intérêt général.

 

samedi 17 octobre 2020

 

UNE BELLE JOURNEE DE MOBILISATION

POUR LE PROCES DES OGM A PERPIGNAN !



Le beau temps était de la partie, avec l’aide de la tramontane, en ce jeudi 15 octobre pour la journée de mobilisation autour du procès du fauchage de tournesols VrTH d’août 2016 à Elne.

Après le défilé dans les rues du centre-ville de Perpignan, un rassemblement devant le Palais de Justice a réuni, à l’appel du Collectif anti-OGM 66, des Faucheurs Volontaires et de la Confédération Paysanne, les comparants volontaires venus de toute la France autour du seul inculpé, ainsi que de nombreux soutiens locaux.

Pour ce qui concerne le procès, les 43 comparants volontaires n'ont pas été retenus après avoir décliné leur état-civil.

Les témoins, scientifiques de grande qualité, ont été écoutés avec attention en général par le Tribunal  dont le Président semblait, cependant, dépassé par les notions scientifiques, ce qui peut expliquer son attitude brusque avec Cécile Stratonovitch qui n'a pas eu le temps de développer ses travaux très précis sur l'impact des pesticides sur la santé ; très dommage !

Pour leur part, les autres témoins ont évoqué les thèmes suivants !

- l’identification des OGM, les nouvelles techniques de mutagenèse (Yves Bertheau),

- le refus d’agir de l’État, la demande de moratoire sur les VrTH, le problème des semences et des brevets, l’agriculture paysanne, les aspects politiques (Guy Kastler),

- les aspects agronomiques et environnementaux des VrTH (Valentin Beauval).

Françoise Marill a représenté les comparants volontaires et affirmé la nécessité de la désobéissance civile.

A l’issue de l’audience, maître Tumerelle a fourni quelques éléments sur sa plaidoirie, notamment :  la mise en évidence de la légalité du fauchage de plantes illégales ; la toxicité des pesticides ; le non-respect par le gouvernement de l'arrêt du Conseil d'Etat ; la mise en parallèle de l'augmentation des cancers (+ 6%) et des pesticides (+ 5 %) ; le fait que le Président ne savait pas s'il s'agissait ou non d'OGM ; la disparition du demandeur, Nidera, absorbé par Syngenta; pas de justificatifs pour les demandes de dommages et intérêts ; pas de justificatifs de la reprise par Syngenta de la plainte de Nidera. 

Le délibéré sera rendu le 17 décembre à 14h.

Pour l'extérieur, nous remercions vivement tous ceux qui se sont déplacés pour manifester leur implication et leur solidarité, et contribuer ainsi à amplifier l'écho médiatique de ce procès.

 

                       

 

                     

mercredi 7 octobre 2020


SOUTIEN AUX FAUCHEURS VOLONTAIRES

PROCES DES OGM

JEUDI 15 OCTOBRE 2020

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE
PERPIGNAN

Fauchage de 3 ha de semences de tournesols
génétiquement modifiés en août 2016 à Elne

 

Jeudi 15 octobre :
● 13 h : Place Rigaud, départ en cortège vers le Tribunal, Place Arago
● 14 h : Entrée dans le Tribunal (les témoins et comparants volontaires
entreront en priorité dans la salle du Tribunal) et installation des
stands.


L’après-midi : Stands associatifs, prises de parole, comptes rendus de
l’audience en cours, et animation musicale par « Les Voix libres » et
« Le Faucheur Chantant ».


sous réserve des prescriptions anti-covid


OGM NON !
NI ICI NI AILLEURS !


jeudi 16 juillet 2020

SOUTIEN AUX FAUCHEURS VOLONTAIRES

POUR LE PROCES DES OGM MUTES

Jeudi 15 octobre 2020 à 14 h

Tribunal de Grande Instance de Perpignan

Le 1er août 2016, les Faucheurs Volontaires d’OGM ont détruit 3ha de semences de tournesols génétiquement modifiés pour tolérer un herbicide, l’Imazamox .

Depuis plus de 3 ans, diverses entités ont mis en garde les autorités contre la nocivité des cultures VrTH (Variétés renduesTolérantes aux Herbicides):
Au niveau national, en 2012, un collectif d’associations, « l’Appel de Poitiers » avait demandé au gouvernement un moratoire sur les colzas et tournesols mutés ; faute de réponse, un recours était formé devant le Conseil d’État ; celui-ci demandait à la Cour Européenne de Justice de se prononcer sur le statut des cultures obtenues par les nouveaux procédés de modification génétique.
Au niveau local, les Faucheurs Volontaires, le Collectif anti ogm 66, la Confédération Paysanne ont provoqué des réunions avec la Chambre d’Agriculture, le Conseil Général, le GNIS, les entreprises semencières pour alerter sur les conséquences de ces cultures tant au niveau local qu’au niveau national puisqu’il s’agissait de semences destinées ensuite à toute la France.
Le Collectif anti ogm 66, avec le soutien d’associations locales et de citoyens, a procédé en 2014 et 2015 à la distribution de graines de tournesols bio afin de contrer la production de ces semences.
En dépit de ces oppositions, les semenciers ont continué la culture des tournesols mutés.
Les Faucheurs Volontaires n’ont, alors, eu d’autre recours que la destruction .

En cela, ils n’ont fait qu’anticiper la décision de la Cour Européenne de Justice :
le 25 juillet 2018, celle-ci rendait son verdict : les variétés mutées sont des ogm comme les variétés transgéniques mais les variétés obtenues par des procédés antérieurs à la Directive européenne 2001/18 et dont la sécurité est avérée depuis longtemps, sont exclues de la réglementation.
Cette décision est d’application immédiate dans les Pays Européens, et le 7 février 2020, le Conseil d’État demandait au gouvernement français de s’y conformer dans un délai de 6 mois.

Pour nous, les Faucheurs Volontaires ont fait acte de désobéissance civile, en détruisant des cultures aux conséquences désastreuses pour l’environnement, la maîtrise des semences et la santé humaine.
Ils ne sauraient être jugés pour une action de préservation de l’environnement, de sauvegarde de la santé, de maintien de la libre disposition de semences pour les paysans.
C’est pourquoi toutes celles et ceux (partis, associations, syndicats, citoyens) qui refusent une agriculture et un environnement soumis aux puissances de l’argent doivent être présents le 15 octobre pour affirmer leurs choix de vie.

CE PROCES N’EST PAS CELUI DES FAUCHEURS VOLONTAIRES D’OGM, C’EST CELUI DES OGM MUTES QUI DOIVENT ÊTRE INTERDITS ICI COMME AILLEURS

lundi 8 juin 2020

France - Des OGM autorisés... bientôt interdits

Le 6 mai 2020, le gouvernement a notifié à la Commission européenne trois projets de textes réglementaires destinés à modifier la législation française sur les OGM et la liste des variétés autorisées à la commercialisation. D’ici début août, le premier de ces textes doit encore être soumis à l’avis du Haut Conseil des biotechnologies et mis en consultation publique. En l’état, le gouvernement français prévoit de déclarer que les techniques de « mutagénèse aléatoire in vitro », comme toute mutagénèse dite « dirigée », donnent des OGM réglementés. Il a identifié une centaine de variétés contenant un même caractère de tolérance aux herbicides obtenu par une technique donnant des OGM réglementés.
Le 7 février dernier, le Conseil d’État écrivait que « tant les techniques ou méthodes dites «  dirigées » ou «  d’édition du génome  » que les techniques de mutagénèse aléatoire in vitro soumettant des cellules de plantes à des agents mutagènes chimiques ou physiques » donnent des OGM qui doivent être soumis à la législation européenne [1]. Il donnait ainsi raison, contre le gouvernement, aux organisations de la société civile qui attendaient cette décision depuis dix ans et avaient fini par engager un recours juridique en 2016. Et il donnait six mois au gouvernement pour rendre la loi française conforme à la loi européenne.

Un contenu conforme

Pour reprendre les mots du Conseil d’État, la première étape pour le gouvernement est de fixer « par décret pris après avis du Haut Conseil des biotechnologies, la liste limitative des techniques ou méthodes de mutagénèse traditionnellement utilisées pour diverses applications et dont la sécurité est avérée depuis longtemps » [2].
Dans son projet de décret, rendu public par la Commission européenne [3], le gouvernement prévoit donc de déclarer que la mutagénèse aléatoire donne des OGM exemptés des requis de la loi, à l’exception de la « mutagénèse aléatoire in vitro consistant à soumettre des cellules végétales cultivées in vitro à des agents mutagènes chimiques ou physiques ». Les produits issus de mutagénèse aléatoire appliquée sur cellules cultivées in vitro, comme ceux de toute mutagénèse dite « dirigée », sont donc, pour la France, des OGM réglementés qui devraient être évalués, autorisés, étiquetés et suivis.
Dans son projet de décret, le gouvernement a pris soin de légiférer sur les semis réalisés cette année. Ainsi, les variétés qui « ont été semées ou implantées avant la date de leur inscription sur une liste fixée par arrêté du ministre chargé de l’agriculture, (...) peuvent être menées à terme ». Les cultures implantées avec des variétés non étiquetées OGM lors du semis pourront donc être récoltées bien qu’en infraction avec la décision du Conseil d’État. Rien par contre n’est encore précisé au sujet de la commercialisation de leur récolte : sera-t-elle autorisée par dérogation, interdite, étiquetée, non étiquetée ?

Des variétés bel et bien identifiées

Le Conseil d’État a également imposé au gouvernement d’identifier dans le catalogue les variétés obtenues par des techniques de mutagénèse donnant des OGM réglementés, et d’en annuler leur inscription. Concrètement, le gouvernement ne peut radier du catalogue européen, compilation de tous les catalogues nationaux de l’Union européenne, que les variétés que l’État français y a lui-même inscrites et non celles inscrites par d’autres pays. Le gouvernement a donc notifié à la Commission deux arrêtés. Le premier liste 96 variétés (voir le tableau ci-dessous) enregistrées au catalogue européen par d’autres pays que la France et «  issues de mutagénèse aléatoire in vitro consistant à soumettre des cellules végétales cultivées in vitro à des agents mutagènes chimiques ou physiques  ». Pour ces variétés, le gouvernement indique qu’elles « seront interdites à la commercialisation et à la mise en culture en France, faute d’avoir été évaluées et autorisées au titre de la règlementation relative aux OGM » [4]. Le second annule l’inscription de sept d’entre elles sur une liste du catalogue français concernant des variétés dont les semences destinées à la mise en marché en-dehors de l’Union européenne peuvent être multipliées sur le territoire français [5].
Dans tous les cas, il s’agit uniquement de variétés de colzas, aucune autre espèce n’ayant été identifiée par le gouvernement français comme issue de mutagénèse dirigée ou de mutagénèse aléatoire in vitro telle que définie par le décret. Dans le message accompagnant la notification de l’arrêté listant toutes ces variétés, le gouvernement précise bien qu’il s’agit de « variétés de colza tolérantes aux herbicides, commercialisées sous le nom de colza Clearfield » pour lesquelles « la méthode d’obtention décrite dans la bibliographie correspond à cette technique ». L’identification des variétés obtenues par mutagénèse aléatoire in vitro, a minima documentaire, est donc bel et bien possible malgré les affirmations contraires maintes fois répétées des promoteurs d’OGM. À l’occasion de diverses manifestations, la Confédération Paysanne et les organisations de la société civile avaient aussi pointé du doigt ces colzas Clearfield, publications scientifiques à l’appui. Il est difficile à ce stade de savoir si le gouvernement français s’est contenté d’identifier les seules variétés pointées par la société civile... L’avenir répondra à cette question, si des variétés d’autres plantes devaient être à leur tour identifiées.

Le gouvernement veut-il restreindre la portée du décret ?

Certains détails contenus dans le projet de décret pourraient avoir des conséquences. Il en est ainsi de la définition qui précise que la mutagénèse aléatoire in vitro consiste « à soumettre des cellules végétales cultivées in vitro à des agents mutagènes chimiques ou physiques ». Avec cette définition, le gouvernement propose de fixer dans la loi un extrait des attendus de la décision du Conseil d’État. Ce dernier détaillait que « les techniques de mutagénèse aléatoire in vitro soumettant des cellules de plantes à des agents mutagènes chimiques ou physiques [...] sont apparues postérieurement à la date d’adoption de la directive 2001/18/CE ».
Le Conseil d’État ne présentait pas une liste exhaustive des techniques concernées, mais donnait simplement des exemples. Le gouvernement propose finalement une définition de la mutagénèse aléatoire in vitro qui pourrait être lue comme impliquant obligatoirement l’utilisation d’agents mutagènes chimiques ou physiques. Or, une des techniques de modification génétique mise en œuvre in vitro est la variation somaclonale. Cette technique vise à générer de nouvelles variétés en induisant des mutations par la seule mise en culture in vitro de cellules. Le Groupement national interprofessionnel des semences et plants (Gnis) la présentait dans une version précédente de son site internet, comme étant «  la modification observée chez certaines cellules, après un long cycle de cultures in vitro sans régénération [...] Cette variation peut être due à une modification du génome nucléaire ou du génome des organites cytoplasmiques ». Mais, précisait-il, elle est peu utilisée « par les sélectionneurs car on ne peut prévoir la variabilité créée. De plus, les modifications de caractères obtenues sont peu stables et ne se retrouvent pas toujours dans la plante régénérée, ou dans sa descendance ». Sur son site actuel, il n’est plus question de modification mais d’une «  variation des caractères génotypiques parentaux de cellules végétales somatiques en culture in vitro ».
La variation somaclonale in vitro pourrait-elle être considérée légalement comme n’étant pas une technique de mutagénèse aléatoire in vitro si le décret devait être adopté dans sa forme actuelle ? Un élément de la réponse sera de savoir si les éléments chimiques utilisés dans le milieu de culture in vitro sont des agents mutagènes ou non.
Le second détail est tout aussi stratégique. Pour l’instant, la loi française liste des « techniques […] qui ne sont pas considérées comme donnant lieu à une modification génétique » parmi lesquelles se trouvent « la mutagénèse » et d’autres techniques comme la fusion cellulaire, l’autoclonage, l’induction polyploïde [6]...
Avec son projet de décret, le gouvernement cherche à maintenir la confusion entre les techniques qui ne sont pas considérées comme produisant des OGM et celles qui produisent des OGM exemptés. Le projet de décret prévoit en effet de modifier la loi française pour qu’elle établisse non plus la liste des « techniques […] qui ne sont pas considérées comme donnant lieu à une modification génétique » mais la liste des « techniques […] qui ne sont pas considérées comme donnant lieu à une modification génétique ou qui ont fait l’objet d’une utilisation traditionnelle sans inconvénient avéré pour la santé publique ou l’environnement ».
La conséquence immédiate est qu’il ne sera plus possible de savoir si une technique se trouve dans cette liste car elle ne donne pas lieu à une modification génétique ou si elle donne des OGM exemptés des requis de la loi car utilisée depuis longtemps sans risque. Une distinction pourtant faite par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) qui autorise les États à réglementer au niveau national les OGM exemptés du champ d’application de la réglementation OGM européenne et non les plantes issues de techniques qui ne sont pas considérées comme donnant lieu à une modification génétique [7].

Un avis du HCB et une consultation publique à venir

En donnant six mois pour que le décret soit adopté, le Conseil d’État a imposé que ce texte paraisse avant le 7 août 2020. En notifiant à la Commission européenne le 6 mai 2020 son projet de décret, le gouvernement français a déclenché une procédure dite de statu quo au cours de laquelle des commentaires peuvent être faits sur le site de la Commission européenne jusqu’au 7 août 2020, précisément à la fin du délai fixé par le Conseil d’État. Dans l’intervalle, le gouvernement français doit également organiser une consultation publique en France comme l’indique le projet de décret lui-même. Une consultation publique nationale qui, selon nos informations, n’a pas encore été lancée. Enfin, le gouvernement doit obtenir, pour le décret, l’avis du Haut Conseil des biotechnologies comme le lui impose la loi française.
Quelles seront les réponses de la Commission européenne et des États membres aux projets de décret et d’arrêtés présentés par la France ? La question n’est pas anodine. Le Conseil d’État n’a d’autorité qu’en France et ses décisions ne s’imposent pas aux autres pays européens. Si certains pays de l’Union n’appliquent pas la même décision, les textes français pourraient créer un obstacle commercial au sein du marché unique en interdisant de commercialiser en France des variétés autorisées dans d’autres États membres. Si une telle objection est faite dans le cadre de la procédure de notification européenne, dont l’objectif est justement de « prévenir la création d’obstacles au commerce », quelle sera la réaction de la Commission ? Et comment le gouvernement français mettra-t-il alors en œuvre la décision du Conseil d’État ? À l’inverse, si aucune objection n’est faite, il pourrait alors être compris que les autres États membres ne voient pas de distorsion de concurrence. Peut-être auront-ils eux-mêmes commencé à radier de leur catalogue les variétés obtenues par mutagénèse aléatoire in vitro… ou pas ?
Enfin, quid des contrôles aux frontières si on ne peut pas commercialiser les mêmes variétés dans plusieurs États membres si les variétés interdites de commercialisation en France restent au catalogue européen ? Et quid de la commercialisation des produits qui en sont issus ? Le sujet ne peut décidément plus échapper au débat européen.


[5Arrêté modifiant le Catalogue officiel des espèces et variétés de plantes cultivées en France (semences de colza et autres crucifères), (notification 2020/0282/F).
[6Code de l’environnement, article D. 531-2, 2ème paragraphe, point a
[7Pour la législation européenne, la fécondation in vitro, la conjugaison, la transduction, la transformation ou l’induction polyploïde sont des techniques ne donnant pas des OGM alors que la mutagénèse et la « fusion cellulaire de cellules végétales d’organismes pouvant échanger du matériel génétique par des méthodes de sélection traditionnelles » donnent des OGM exemptés de l’application de la réglementation. À ce jour, pour la loi française, ces techniques ainsi que, pour les micro-organismes, l’infection de cellules vivantes par les virus, viroïdes ou prions ou l’autoclonage « ne donnent pas lieu à une modification génétique ».

samedi 8 février 2020

OGM : LE CONSEIL D'ETAT SUIT LES ORGANISATIONS CONTRE LE GOUVERNEMENT

Le 7 février 2020 [1], le Conseil d’État met un point final à plus de cinq ans d’une procédure qui a opposé neuf associations au gouvernement sur certaines techniques de modification génétique de mutagenèse. Le Conseil d’État affirme que les techniques de mutagenèse dites « dirigée » et « aléatoire in vitro » sont soumises à la réglementation OGM.
Le Conseil d’État impose au gouvernement, avec l’aide du Haut conseil des biotechnologies (HCB), d’établir la liste des techniques de modification génétique ayant été traditionnellement utilisées sans risque. Pour un gouvernement n’ayant jamais demandé ou suivi les techniques utilisées pour les variétés inscrites au catalogue, cela annonce un gros travail.
Concrètement sont visés par cette décision notamment des tournesols et colza rendus tolérants aux herbicides (VrTH). Ces derniers devront être retirés du catalogue officiel des plantes sous neuf mois s'ils n’ont pas été évalués selon les modalités définies par la directive 2001/18. Les associations requérantes précisent dans un communiqué de presse que ces variétés ont été inscrites illégalement et « que cela concerne toutes les nouvelles techniques de mutagenèse, y compris celles appliquées sur des cellules isolées et multipliées in vitro. Cela concerne notamment les variétés rendues tolérantes aux herbicides de colza Clearfield et de tournesol Clearfield Plus » [2].
Par ailleurs, le refus, en 2015, du premier ministre d’abroger le décret D 531-2 du Code de l’environnement listant les techniques qui ne « sont pas considérées comme donnant lieu à une modification génétique », où figure « la mutagénèse », ainsi que l’établissement d’un moratoire sur les variétés rendues tolérantes à des herbicides (VrTH), est annulé.
Pour annuler ce refus du premier ministre et justifier de sortir certaines variétés du cataologue, le Conseil d’État s’appuie principalement sur l’arrêt rendu en 2018 par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) suite à des questions préjudicielles posées par le Conseil d’État [3]. Cet arrêt de la CJUE a permis d’éclairer la lecture de la législation européenne sur les OGM (directive 2001/18). En effet, selon cet arrêt, seules les techniques de mutagénèse ayant été traditionnellement utilisées dans de multiples applications et sans risque n’ont pas besoin d’être soumises aux obligations d’évaluation et d’autorisation de la directive (annexe I B).
Une décision dont la mise en oeuvre fera très certainement l’objet de débats à venir.
« Le Conseil d’État a par ailleurs estimé qu’en vertu du principe de précaution, le Premier ministre ne pouvait refuser de prendre des mesures de prévention pour l’utilisation de variétés de plantes rendues tolérantes aux herbicides », peut-on aussi lire dans la décision. Les associations et syndicats qui demandaient un moratoire sur toutes les variétés rendues tolérantes à un herbicide, soulignent que le Conseil d’État ne le demande pas mais « enjoint le gouvernement de réaliser une évaluation des risques générés par ces variétés et de définir des conditions de culture destinées à limiter l’utilisation des herbicides ».
Au final, « Les associations requérantes se félicitent de cette décision du Conseil d’État qui fait passer la santé et l’environnement avant les intérêts économiques de quelques firmes semencières et productrices de pesticides. Elles attendent du gouvernement qu’il applique enfin la loi en respect du principe constitutionnel de précaution ».

[1]
https://www.conseil-etat.fr/ressources/decisions-contentieuses/dernieres-decisions-importantes/conseil-d-etat-7-fevrier-2020-organismes-obtenus-par-mutagenese
[2] http://confederationpaysanne.fr/actu.php?id=9711
[3] Inf'OGM, « Europe - Les nouveaux OGM sont des OGM comme les autres », Charlotte KRINKE, 25 juillet 2018
 
Source : infogm.org